Pourquoi confions-nous les questions qui nous taraudent le plus à des constellations improbables et pourquoi la lecture de l’horoscope fait-elle du bien ?
Astrologie : beaucoup ne voient dans ce mot que le A majuscule en forme de chapeau pointu de Nostradamus. En d’autres termes, une pratique fumeuse, exercée par des charlatans et destinée aux faibles d’esprits. Pourtant, tout le monde lorgne un jour par curiosité sur son horoscope et nombreux sont les gens “sérieux” qui n’hésitent pas à approfondir l’étude de leur thème astral.
Pourquoi, en 2014, avons-nous encore recours à un rite aussi irrationnel, méprisé par la science officielle ? Pour satisfaire notre quête de vérité ? Ou tout simplement parce que l’astrologie se situe entre passé mythologique incertain et futur imprévisible et qu’elle a l’art d’en dire plus long sur notre présent ?
En dehors de ses prédictions toutes relatives, les principaux reproches faits à l’astrologie sont le manque de fondement scientifique ainsi que sa propension à toucher les esprits les plus influençables, dépendants, anxieux, conformistes, incultes, narcissiques ou résignés. Ce à quoi ses fervents défenseurs répondent qu’il existe une astrologie sérieuse et une autre non, en faisant référence aux trois lignes laconiques des horoscopes des quotidiens ou des magazines.
Horoscope de journal ou thème astral, un spiritisme de bon sens
La lecture de l’horoscope du jour est soigneusement codée. Elle n’évoque ni fantômes, ni forces mystérieuses agissant à notre insu. Elle nous parle à travers des planètes. Même si les conseils donnés au nom de ces planètes pourraient très bien être délivrés sans elles…
Le format des horoscopes de quotidien s’apparente plutôt à une astrologie en 365 épisodes. Le message général qui domine est souvent du type : “Des problèmes au début, mais à la fin tout s’arrange”. Autrement dit : “suite au prochain épisode, accessoirement pour vérifier si ce qui est advenu entre temps était écrit, mais plus sûrement pour savoir ce que vos planètes vous réservent pour la suite”.
Même s’il prend des formes qui confinent parfois à la stupidité, telles que :” Verseau, ne vous agitez pas précipitamment”, ce qui est demandé à un horoscope ou à un thème astral n’est pas tant le script de notre vie, mais de remplir une fonction socialisante qui se résout par l’invariable question :”De quel signe êtes-vous ?” La mythologie au sens caché, toujours suggéré mais jamais révélé, offre une clef de lecture du quotidien dont la première vertu est de nous faire sentir notre appartenance à la communauté.
Rédacteur de talent ou astrologue de renom, un correspondant fidèle de l’âme humaine
Le succès de l’astrologie réside justement dans sa capacité à nous raconter des histoires sur mesure, à nous tranquilliser en mettant de l’ordre dans les événements de notre vie, à leur attribuer une raison ou un sens pour pouvoir purger les tensions et émotions accumulées, en somme, à trouver notre place dans la relation avec les autres.
Rob Brezsny, l’un des plus célèbres astrologues américains déclarait clairement : “J’écris des lettres d’amour à mes lecteurs”. A l’ère de l’individualisme galopant, de la solitude accablante et du triomphe désenchanté de la raison, l’horoscope de la radio, des pages de journaux ou envoyé dans notre messagerie électronique, semble nous dire invariablement :” Il y a du courrier pour vous tous les jours”.
A travers la géniale médiation des signes zodiacaux, ceux qui écrivent nos horoscopes le savent bien. Ils utilisent le pouvoir de l’écriture pour accomplir un acte d’humanité et d’altérité au sens platonique le plus pur. Au fond, nous ne sommes pas si naïfs pour demander à l’horoscope de prévoir le futur. Il nous suffit d’une mise en perspective exprimée de façon simple et cordiale, à travers une histoire dont nous sommes l’acteur principal.
Quelqu’un, quelque part derrière un ordinateur a pris soin d’écrire le scénario de notre vie et de lui donner un sens. “A la fin, tout ira bien”. Voilà pourquoi on peut lire l’horoscope sans croire à l’astrologie et pourquoi tout le monde peut l’interpréter à sa façon. Elle répond à notre peur de l’avenir, parce que tout simplement, interroger le futur, c’est déjà croire qu’il existe.